Voyage au bout de la nuit
Le narrateur, Ferdinand Bardam, évoque ses debuts en tant que soldat lors de la Guerre de 1914-
(Ses Allemands accroupis sur la route, tetus et diralleurs, tiralent mal, mais ls semblaient avoir des balles en revendri
des pleins magasins sans doute. La guerre décidement In tiarl/ens-"erminde/Notre colonel, il taut dire de qui est males
testait une bravoure stupéfiante i t se promenaient betal Mite de e la chaussée et puis de long en large parmi les
trajectoires aussi simplement que s'Il avait attendu un ami sur le guai de la gare, un peu impatient seulement.
_Moi d'abord la campagne, faut que je le dise tout de suite, a jamais pu la sentit, je l'ai toujours trouvée triste avegans
bourbiers qui n'en finissent pas, ses maisons ou les gens ne sont jamais et ses chemins qui ne vont nulle part. Mais quand
on y ajoute la guerre en plus, c'est a pas y tenir. Le Vent s'était levé brutal, de chaque côté des talus, les peupliers mélaient
leurs rafales de feuilles aux petits bruits secs qui venaient de 1a-Das sur nous. Ces soldats inconnus nous rataient sans cesse,
mais tout en nous entourant de mille morts, on s'en trouvait comme habillés. Je n'osais plus remuer.
Le colonel, c'était donc un monstre l A présent. en étais assuré, pire qu'un chien, il n'imaginait pas son trépas* I de
conçus en même temps qu'il devait y en avoir beaucoup des comme lui dans notre armée, des braves, et puis tout autant
Sans doute dans l'armée d'en face. Qui savait combien 7 Un, deux, plusieurs millions peut-être en tout ? Dès lors ma
trousse devint panique. Avec des êtres semblables, cette imbécillité infernale pouvait continuer indéfiniment... Pourquoi
s'arrêteraient-ils ? Jarnais je n'avais senti plus implacable la sentence des hommes et des choses.
Serais-je donc le seul lâche sur la terre ? pensais-je. Et avec quel effroi ... Perdu parmi deux millions de fous héroiques et
déchainés et armés jusqu'aux cheveux ? Avec casques, sans casques, sans chevaux, sur motos, hurlants, en autos, siffiants,
tirailleurs, comploteurs, volants, à genoux, creusant, Se défilant, caracolant dans les sentiers, pétaradant, enfermés sur la
terre, comme dans un cabanon, pour y tout détruire, Allemagne, France et Continents, tout ce qui respire, détruire, plus
enragés que les chiens, adorant leur rage (ce que les chiens ne font pas), cent, mille fois plus enragés que mille chiens et
tellement plus vicieux ! Nous étions jolis i Décidément, je le concevais, je m'étais embarqué dans une croisade
apocalyptique.
Louis-Ferdinand Céline (1894-1961),
Voyage au bout de la nuit (1932) © Ed. Gallimard.
1. bourbier: lieu creux plein de boue. 2. son trépas: sa mort
Questions
Le narrateur.
1)
2)
Où la scène se déroule-t-elle?
Qui raconte cette histoire ? Relevez le pronom employé par le narrateur. Fait-il partie de
l'histoire ? Pourquoi ?
3)
Relevez quelques termes du langage familier. Qu'est-ce que cela nous dit sur le niveau social
du narrateur ?
4)
Dans les trois premières lignes du deuxième paragraphe, quels sont
les temps
majoritairement employés? Relevez-en deux exemples. Le narrateur est-ii toujours en train de raconter ?
Que fait-il?
Analyse de la phrase.
5) « Ces Allemands accroupis sur la route, têtus et tirailleurs, tiraient mal, mais ils semblaient avoir des balles à
en revendre, des pleins magasins sans doute. » Analysez cette phrase complexe en identifiant les propositions
et leur articulation.
6) « Moi d'abord la campagne, faut que je le dise tout de suite, j'ai jamais pu la sentir, je l'ai toujours trouvée
triste, avec ses bourbiers] qui n'en finissent pas, ses maisons où les gens n'y sont jamais et ses chemins qui ne
yont nulle part. »
Identifiez précisément les éléments soulignés et donnez leur fonction.
7) « Ces soldats inconnus nous rataient sans cesse... » Analysez la fonction de tous les mots dans cette phrase.
8) Donnez la classe grammaticale de tous le mots en gras du dernier paragraphe.
La folie de la guerre,
9) Montrez en relevant et analysant une figure de style précise que le narrateur cherche à exagérer son
propos.
10) « On s'en trouvait comme habillés » Quelle est cette figure de style ? Expliquez la.
11)
« Fous héroïques » Quelle figure repérez-vous ici ? Que signifie-t-elle?.